Le cycle de colloques Les femmes de l’Opéra Comique (deux éditions à ce jour : 2019 et 2020) propose d'aller à la découverte des autrices, compositrices, interprètes, spectatrices, administratrices et personnages de fiction qui ont fait la vie de notre institution tricentenaire, à travers une large diversité de profils, d’expériences et de problématiques.
Nous vous proposons ici de découvrir les podcasts des intervenant.e.s de l’édition 2020.
En cette semaine marquée par la Journée internationale des droits des femmes, nous remettons à l'honneur le colloque Les femmes de l’Opéra Comique n°2, qui s'est tenu en nos murs en février 2020, avec une série de podcasts.
Prochain rendez-vous : septembre 2021
« L’énigmatique Mlle Le Sénéchal de Kercado, compositrice » - Florence Launay
Compositrice d’un unique opéra à l’âge de dix-neuf ans, Marie Alexandrine Hyacinthe Le Sénéchal de Kercado (1785-1815) est un personnage dont de nombreux éléments biographiques nous demeurent inconnus. Suite à la récente découverte de la partition autographe de son œuvre La Méprise volontaire ou la Double Leçon (1805) aux archives de Nantes, Florence Launay nous livre le récit de la vie de Mlle Le Sénéchal de Kercado et nous fait découvrir sa production artistique.
Florence Launay, docteure en musicologie de l'Université de Rennes 2, est l'autrice d'un ouvrage issu de sa thèse, Les Compositrices en France au XIXe siècle (Fayard, 2006). Elle a également publié des articles sur une douzaine de compositrices, ainsi que des articles examinant l'accès des femmes aux professions de la musique, notamment « Les musiciennes : de la pionnière adulée à la concurrente redoutée - Bref historique d’une longue professionnalisation », (Travail, genre et sociétés, n° 19, avril 2008) et, récemment « L'Occultation des compositrices dans l'histoire de la musique », (Compositrices - L'Égalité en actes, CDMC/Éditions MF, 2019). Elle est aussi artiste lyrique et se consacre à la romance, à la mélodie et aux chansons françaises et languedociennes en liaison avec ses recherches musicologiques.
« L’art du chant de Marie-Jeanne Trial (1746-1818) » – Raphaëlle Legrand
Épouse d’Antoine Trial (1737-1795), célèbre ténor de l’Opéra Comique, Marie-Jeanne Trial a trop peu suscité l’attention des curieux et des chercheurs, alors même qu’elle a connu une brillante carrière de chanteuse au sein de l’institution. Elle est prisée par le public dès ses débuts, et l’on admire tant le timbre que la précision technique de son chant. Raphaëlle Legrand nous invite à plonger dans la vie de Marie-Jeanne Trial, pour qui André-Modeste Grétry composa le rôle de Léonore dans l’Amant jaloux (1778).
Professeure de musicologie (Sorbonne Université), Raphaëlle Legrand travaille sur l’opéra et l’opéra-comique en France au XVIIIe siècle, l’œuvre musicale et théorique de Rameau, la place des femmes dans l’opéra. Membre de l’UMR 8223 (IReMus), co-directrice du Groupe de Recherche Interdisciplinaire sur la Musique et les Arts du Spectacle (GRIMAS), co-fondatrice du Cercle de Recherche Interdisciplinaire sur les Musiciennes (CReIM), elle a publié Regards sur l’opéra-comique (CNRS Editions, 2002, avec N. Wild), Rameau et le pouvoir de l’harmonie (Cité de la Musique, 2007) et co-dirigé Sillages musicologiques (CNSMDP, 1997, avec Ph. Blay), Entre théâtre et musique (Cahiers d’histoire culturelle, 1999, avec L. Quetin) et Musiciennes en duo (PUR, 2015, avec C. Giron-Panel, S. Granger et B. Porot)
« Les chanteuses d’opéra-comique en province : portraits artistiques d’agentes vectrices dans le transfert d’un objet culture. Moitié sud de la France, 1825-1850 » – Benjamin Frouin
Dans la première moitié du XIXe siècle, des milliers de chanteuses se produisent chaque soir dans les quelque 170 théâtres que compte la province française. Benjamin Frouin livre les portraits de quelques-unes de ces professionnelles de la musique et reconstitue ce qu’étaient les carrières de ces femmes - depuis leur formation jusqu’à leur engagement par des théâtres et leurs débuts sur scène - à une époque où l’opéra-comique est le genre lyrique national par excellence.
Après un master en musicologie et une licence en histoire de l'art, Benjamin Frouin finalise une thèse dont l'objectif est de présenter ce que sous-entend la dénomination des emplois lyriques féminins dans la moitié sud de la France, durant la période significative du second quart du XIXe siècle. Il est chercheur associé à la BnF de 2015 à 2018 pour la reconstitution et l’exploration à Paris, Bruxelles et Bologne des vestiges des archives de l'érudit, musicographe et bibliophile Aristide Farrenc (1794-1865, époux de Louise Farrenc). Depuis janvier 2020 à Montpellier, il est chargé d'enseignement de culture musicale en école de danse pour la préparation au concours de DE de danse.
Publications :
Patrick Taïeb et Benjamin Frouin, « Jean-Baptiste Léon Dupin, critique et agent dramatique »
« Le magasin de partitions et de livrets Lemerre : enquête autour d'une direction théâtrale de province (1839-1840) et reconstitution d'un fonds. » in Bulletin Historique de la ville de Montpellier, n°39, 2017, p. 20-51.
À paraître :
« Vers une consécration (formelle) du genre : Fortune et infortune de Struensée (Beer et Meyerbeer) à Paris » ; « La bibliothèque musicale formée par Aristide Farrenc (1794-1865). Enquête sur la constitution et l'exploitation d'un outil de travail et d'édition » ; Deux articles pour un livre intitulé Penser (à) l'Opéra : « Débat autour de la ‘décadence théâtrale’ en province au milieu du XIXe siècle à Bordeaux: écrits de directeurs, critiques et autres littérateurs. » et « Chanteuses et danseuses de l'Opéra de Bordeaux en représentations... iconographiques ».
« Attendre un enfant : vécu et représentation de la grossesse au XVIIIe et XIXe siècles » – Emmanuelle Berthiaud
Si la grossesse est un état courant pour les femmes jusqu’à la fin XIXe siècle, elle demeure toutefois peu visible dans les représentations artistiques et les discours produits à cette époque. Emmanuelle Berthiaud nous parle ici des savoirs, des pratiques et des usages féminins autour de la grossesse et nous propose de réfléchir à ce que représente la maternité dans la construction de la figure de la mère, à la croisée entre sexualité, procréation et filiation.
Emmanuelle Berthiaud, historienne, enseigne à l’université de Picardie-Jules-Verne d’Amiens. Elle est spécialiste de l’histoire des femmes, du corps et de la médecine aux XVIIIe et XIXe siècles. Elle est notamment l’autrice de Enceinte, Une histoire de la grossesse entre art et société (La Martinière 2013) et Le Rose et le Bleu, La fabrique du féminin et du masculin, co-écrit avec Scarlett Beauvalet (Belin, 2016). Un CV détaillé et des publications en ligne sont accessibles sur HAL.
Institution de rattachement : l’UPJV (Université de Picardie Jules Verne)
Laboratoire : CHSSC (Centre d’Histoire des Sociétés, des Sciences et des conflits, UPJV d’Amiens).
« Compositrices du XXe siècle à l’Opéra-Comique : Barraine, Leleu, Tailleferre » - Cécile Quesney
Entre 1932 et 1955, les opéras composés par des femmes fleurissent sur la scène de l’Opéra Comique, alors qu’ils avaient disparu de la programmation du théâtre durant les soixante années précédentes. Tout en revenant sur les politiques culturelles du Front Populaire et des gouvernements de l’Entre-deux guerres, Cécile Quesney présente les carrières d’Elsa Barraine, Jeanne Leleu et Germaine Tailleferre et explique la façon dont ces compositrices ont réussi à faire entendre leur musique jusque sur la scène, appuyées par les avant-gardes de l’époque.
Cécile Quesney est attachée temporaire d’enseignement et de recherche à l’UFR de Musique et Musicologie de Sorbonne Université. Agrégée, docteure et diplômée du CNSMDP en musicologie, elle s’intéresse à l’histoire des pratiques musicales en France et en Europe dans la première moitié du XXe siècle, en particulier pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a publié Chanter, rire et résister à Ravensbrück, codirigé avec M.H. Benoit-Otis, P. Despoix et D. Maazouzi, Seuil, 2018, et Mozart 1941, coécrit avec M.H. Benoit-Otis, PUR, 2019.
« "S'il m'était permis de parler..." : désir féminin et dramaturgie du secret dans Sophie ou le Mariage caché de Marie-Jeanne Riccoboni et Joseph Kohaut » - Marie-Cécile Schang-Norbelly.
Actrice du Théâtre Italien pendant plus de trente ans, Marie-Jeanne Riccoboni conjuguait sa carrière théâtrale avec une activité de romancière. À partir de 1761, elle quitte les planches et son mari violent pour se consacrer entièrement à la littérature. Proche de Laclos et de Marivaux, cette artiste polyvalente et reconnue nous a légué nombre de comédies, romans et nouvelles. Marie-Cécile Schang-Norbelly raconte la création de Sophie ou le Mariage caché, unique opéra de Marie-Jeanne Riccoboni, dont l’argument s’inspire du Mariage clandestin de l’acteur anglais David Garrick. L’opéra a sans doute été écrit avec son amie Marie-Thérèse Biancolelli, et Riccoboni a probablement supervisé la musique aux côtés de Joseph Kohaut, le compositeur. Donné huit fois à l’Hôtel de Bourgogne en 1768, l’œuvre disparaît ensuite du répertoire de l’Opéra Comique.
Lors des Journées du Matrimoine des 21 et 22 septembre 2020, l’Opéra Comique et l’association Le Deuxième Texte ont mis en œuvre un atelier Wikisource pour éditer le livret de Marie-Jeanne Riccoboni.
Références :
Marie-Jeanne Riccoboni (1713-1792), Marie-Thérèse Biancolelli (1723-1795), Sophie ou le mariage caché, comédie mêlée d’ariettes, musique de Kohaut, 1768.
Pour aller plus loin :
- Répertoire des œuvres publiées de Marie-Jeanne Riccoboni.
- Une biographie de Marie-Jeanne Riccoboni : CROSBY Emily, Une romancière oubliée, Marie-Jeanne Riccoboni, Sa vie ses œuvres et sa place dans la littérature anglaise et française du XVIIIe siècle, Paris, 1924.
- Un article sur Marie-Jeanne Riccoboni et « l’écriture au féminin » : PIAU Colette, « L’écriture féminine ? À propos de Marie-Jeanne Riccoboni », dans Dix-huitième siècle, n°16, 1984.
- Un article sur les femmes compositrices et librettistes d’opéra au XVIIIe siècle : LEGRAND Raphaëlle, « Femmes librettistes et compositrices à l’Opéra et à la Comédie-Italienne sous l’Ancien régime », prépublication à paraître dans Polymatheia, Les cahiers des Journées des musiques anciennes de Vanves, n°3, novembre 2016, Actes du colloque 2015.
Marie-Cécile Schang-Norbelly est maîtresse de conférences en littérature française du XVIIIe siècle à l'université de Bretagne-Sud. Elle a consacré sa thèse à l'élaboration d'une dramaturgie de la comédie mêlée d'ariettes dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Ses travaux portent principalement sur le théâtre et sur l'opéra-comique au XVIIIe siècle, sur la question des liens entre théâtre et musique, sur le lyrisme, et depuis peu sur le kitsch.
« L’Opéra-comique et ses maîtresses de ballet : une institution pionnière » – Hélène Marquié
La danse a longtemps été un élément secondaire des spectacles proposés par les institutions d’opéra, passant derrière la musique et la mise en scène. Au XIXe siècle, la profession de « régler les pas de danse » prend de l’importance, et c’est à l’Opéra Comique qu’une série de maîtresses de ballet inventent une « culture de la danse ». C’est ainsi que Louise Marquet, Berthe Bernet, Mariquita ou encore Louise Stichel déploient la danse comme un art à part entière, entre 1876 et 1920, au sein de l’Opéra Comique, tant par leur travail chorégraphique que par leurs écrits historiques et théoriques.
Hélène Marquié est professeure à l’Université de Paris 8, spécialiste de la danse et des études de genre. Elle est aussi danseuse et chorégraphe. Elle travaille actuellement sur l’histoire et l’historiographie de la danse à la fin du XIXe siècle (1871-1914), à partir de trois axes s’éclairant mutuellement : l’étude des carrières des maîtresses de ballet, les conditions de travail des artistes de la danse, les métissages des esthétiques et l’élaboration des modernités.
Publications récentes :
- MARQUIÉ Hélène, Non, la danse n’est pas un truc de filles ! Essai sur le genre en danse, aux éditions de l’Attribut, 2016.
- MARQUIÉ Hélène, « ‘Le prestige de l'Opéra couvre tout’. Les coulisses de la danse à l’Opéra Garnier, 1875-1914 », Histoire des coulisses, Revue d'Histoire du Théâtre, 281, janv-mars 2019/1, pp. 73-86.
- MARQUIÉ Hélène, « ‘D’excellentes personnes assez obscures’ - Lecture critique de l’histoire et de l’historiographie de la danse à la fin du XIXe siècle », in Genre et arts vivants, Raphaëlle DOYON, Pierre KATUSZEWSKI (dir.), Horizons/Théâtre n° 10-11, juillet 2018, Presses Universitaires de Bordeaux, pp. 280-294.
- MARQUIÉ Hélène, « Statut, esthétique et genre : trajet de la danse de ballet au travers du XVIIIe siècle français », Le Monde français du dix-huitième siècle: Vol. 2 : Iss. 1, 2017
- MARQUIÉ Hélène, NORDERA Marina (dir.), Perspectives genrées sur les femmes dans l’histoire de la danse, Recherches en danse [en ligne] 3, 2015, mis en ligne le 20 janvier 2015, URL
« Les femmes aujourd’hui dans le spectacle vivant : cadre juridique, état des lieux et perspectives » – Pauline Lombard
Alors même que l’égalité entre les femmes et les hommes a été décrétée « grande cause nationale » du quinquennat Macron, les milieux culturels demeurent pétris du mythe de la puissance du génie créateur masculin – en particulier dans le spectacle vivant. Pauline Lombard montre, à travers une lecture du rapport du Haut Conseil à l’égalité du ministère de la Culture de l’année 2020, comment le cadre juridique français peine à accompagner les carrières des femmes dans les institutions culturelles et les domaines artistiques.
Pauline Lombard a exercé pendant six années la profession d’avocat en droit du travail et en droit pénal, et a rejoint l’Opéra Comique en 2017 en tant qu’adjointe de la directrice des Ressources humaines. Elle est notamment mobilisée sur les questions relatives à la diversité et à l’égalité hommes-femmes.
« Lucienne Bréval et Emma Calvé, interprètes de Massenet : une approche du jeu de scène féminin à l’Opéra Comique » – Jonathan Parisi
Manon, Sapho, Fanny, La Navarraise, Grisélidis… les héroïnes sont nombreuses dans l’œuvre de Jules Massenet, et autant de chanteuses ont été nécessaires à la création ou aux reprises de ces œuvres. À travers les grandes figures de Lucienne Bréval (1869-1935) et Emma Calvé (1858-1942), Jonathan Parisi explore la relation artistique qu’elles ont entretenu avec le compositeur, et montre comment elles ont contribué, par leur jeu de scène personnel, à façonner ces héroïnes au côté du compositeur.
Jonathan Parisi poursuit, sous la direction de Jean-Christophe Branger, une thèse en musicologie consacrée au rôle de Massenet dans les mises en scènes de ses ouvrages à l'Opéra Comique. Il est l’auteur de différents articles dont : « Mettre en scène la Provence : les exemples de Sapho et de Grisélidis de Massenet », « Mettre en scène Cendrillon : d'Albert Carré (1899) à Benjamin Lazar (2011) », ou encore « Massenet, metteur en scène à l'Opéra Comique ? ». Il a occupé les fonctions de Responsable du Développement culturel à l'Opéra Orchestre national de Montpellier, celles de Dramaturge intérimaire au Théâtre du Capitole de Toulouse, a collaboré avec l'Avant-Scène Opéra, a écrit pour le Palazzetto Bru Zane et pour le webmagazine ForumOpéra. Comme metteur en scène, il travaille pour le théâtre et le cabaret. Il a été assistant à la mise en scène pour les productions de Manon (Massenet) et La Bohème (Puccini) à l’Opéra de Saint-Étienne, ainsi que pour le Don Giovanni (Mozart) de Michael Haneke à l’Opéra de Paris.
« Pauline Viardot-Garcia : Du Dernier Sorcier à Cendrillon » - Amy Damron-Kyle
Pauline Viardot-Garcia (1821-1910), issue de la grande famille des pédagogues musicaux Garcia, est une mezzo-soprano de renom de la fin du XIXe siècle, à qui Gounod, Chopin, Saint-Saëns dédient leurs compositions. À la fin de sa carrière, elle devient professeur de chant et compose des œuvres vocales, notamment des opéras. Amy Damron Kyle revient dans cette conférence sur Le Dernier Sorcier (1869) et Cendrillon (1904), deux opérettes aux sujets puisés dans les contes de fées. Pauline Viardot-Garcia y développe une écriture musicale au service de personnages sensibles, incarnant chacun une véritable philosophie et un regard sur la société du XIXe siècle.
Née aux États-Unis, Amy Damron Kyle est doctorante à la Sorbonne Université en Musicologie. Elle est diplômée d’un Master de Chant et d'Histoire de la Musique de l'Université de l’Utah, où elle a enseigné la théorie musicale et la formation musicale. Elle a également travaillé avec des enfants pour créer de petits opéras dont elle écrit la musique. Elle travaille sur la compositrice américaine Amy M. C. Beach. Sa thèse porte sur La Partie de Whist, l'opérette inconnue de Pauline Viardot et le génie musical féminin. Membre du BJC de IreMus, elle a présenté en 2019 une intervention sur l'importance des femmes musiciennes dans le cadre des conférences TEDx Sorbonne. Elle donne par ailleurs des conférences dans plusieurs congrès de musique et musicologie en Europe, et a récemment publié un article dans le magazine The Conversation sur Le Dernier Sorcier.