Sur le fond d’une éternelle comparaison entre les arts italien et français, la polémique oppose un genre noble et sérieux (la tragédie lyrique française) à un genre comique visant l’expression naturelle (l’opera buffa italien). Les querelleurs se disputent au parterre de l’Opéra et dans des pamphlets. Ils confrontent le répertoire de l’institution avec les spectacles d’opera buffa que la troupe italienne d’Eustachio Bambini y donne depuis le mois d’août 1752. Ce sont les fameux « Bouffons » italiens, qui donnent leur nom à cette querelle. La cohabitation des genres et des langues est une première sur la scène royale.
Deux camps se dessinent : ceux que l’on nomme les « bouffonistes », dont le clan rassemble philosophes et encyclopédistes, soutiennent dans leurs écrits et dans la presse les intermèdes proposés par la troupe d’Eustachio Bambini, notamment la Serva padrona de Pergolèse. De l’autre côté, les partisans de l’art français se tiennent sous la loge du Roi, assurent le triomphe de Titon et l’Aurore de Mondonville. Ils s’attaquent aux « bouffonistes » qui sapent la tradition musicale française héritée de Lully. Pour eux, il s’agit avant tout de sauver un genre et la dignité de l’opéra français.
Cette dispute peut sembler circonscrite à quelques intellectuels dans l’enceinte de l’Opéra ; mais elle est aussi le signe d’une évolution plus globale du goût et des formes lyriques au milieu du xviiie siècle, ainsi que de la recherche d’un renouveau pour l’opéra français. La querelle consacre aussi le dynamisme de genres et de scènes très populaires : l’Opéra Comique et la Comédie Italienne, qui proposent avec succès les traductions françaises de certaines œuvres de Bambini, ainsi que les parodies des tragédies lyriques alors représentées à l’Opéra.
Nous vous proposons de découvrir les textes marquants de cette « querelle de pamphlets » (onglet « La guerre à l’Opéra »), mais aussi une partie de ce répertoire qui a profondément marqué la vie intellectuelle et artistique de la fin de l’Ancien Régime. Vous trouverez dans l’onglet « ressources » une bibliographie pour approfondir le sujet.