Argument - Alors que le spectacle à l’Opéra Comique approche, une jeune chanteuse de la Maîtrise Populaire est inquiète. Comme elle confie à son journal intime ses cauchemars et ses doutes, un être mystérieux, mi-jeune fille mi-oiseau, surgit devant elle. C’est la première des rencontres fantastiques de La grande affabulation, conte contemporain où l’héroïne, l’espace d’une nuit, va accompagner une troupe d’oiseaux, de sorciers, de chevaliers et de bêtes sauvages dans leurs aventures initiatique, jusqu’à l’océan.
Musiques anciennes et portraits d’aujourd’hui - La grande affabulation est un spectacle musical mêlant théâtre, musique et danse. Nous avons voulu recréer l’esprit des « fables en musique » des débuts de l’opéra, faire découvrir à cette nouvelle génération les musiques de la fin de la Renaissance et du début de la période baroque qui servent de moteurs à la naissance de l'opéra ; puis, à partir des émotions et des réflexions que cette musique provoque en eux, inventer un récit contemporain qui leur ressemble, dans un esprit d’Heroic fantasy qui mêle divertissement et réflexions philosophiques et politiques.
Un projet sur mesure pour la Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique - Ce genre de projet n’aurait pas pu se faire dans un autre lieu car, pour concevoir cette Grande Affabulation, nous nous sommes appuyés sur les forces spécifiques du projet de la Maîtrise populaire. Celle-ci propose à des jeunes, sur l’ensemble de leur scolarité, une formation artistique variée, ouverte, abordant le chant mais aussi la pratique instrumentale, plusieurs types de danses (danse contemporaine, claquettes) et des cours de théâtre. Aller voir les cours de la Maîtrise dans leur établissement, c’est observer des élèves de tous âges confondus, de parcours et d’origines diverses apprendre à créer ensemble dans une atmosphère d’effervescence, de curiosité et d’écoute les uns envers les autres.
Une variété musicale à l'image de la Maîtrise Populaire - La Maîtrise Populaire réunit des effectifs et des compétences variés et complémentaires. Du chant soliste à la polyphonie à plusieurs voix par pupitres, de la voix de l'enfant à celle de jeunes adultes en passant par les voix en cours de mue, nous avons souhaité adapter les répertoires et leur interprétation aux spécificités d'un groupe qui réunira une multitude de formations comprises entre 1 et 80 chanteurs et chanteuses. Quelques incursions dans des répertoires récents (Benjamin Britten ou Terry Riley) et des adaptations inattendues des musiques anciennes permettront de mettre en valeur les pluralités de savoir-faire des jeunes maîtrisiens et maîtrisiennes. En fosse, un orchestre composé d'instruments des XVIème et XVIIème siècles participera à la réorchestration de ces musiques pour des effectifs inattendus.
Un processus d’écriture participatif - Après une phase d’observation, nous avons mené des ateliers préparatoires avec l’équipe, incluant la chorégraphe Gudrun Skamletz.
Nous leur avons posé des questions sur les images et les pensées qui naissaient des mots et des mélodies que nous leur proposions. Nous les avons aussi interrogés sur la vie adolescente : comment ils ont pris conscience et vécu la sortie de l’enfance, quels souvenirs ils en gardent, comment ils définissent la période qu’ils traversent, quelle est la place qu’ils comptent donner au rêve et à l’imagination dans l’invention de leur vie. Il en est sorti une multitude de récits : peurs et rêves de l’enfance, projections vers l’avenir, souvenirs de contes ou d’histoires vécues. Ces récits et témoignages, nous allons les tisser avec les musiques et les contes anciens, faisant de l’anachronisme et du mélange des temps une des dynamiques du spectacle.
L'anachronisme est aussi au cœur des dispositifs assumés d'appropriation musicale - par exemple, faire cohabiter les claquettes et les métriques de la Renaissance, elles-mêmes inspirées de l'Antiquité grecque. Ce qu'elle génèrera d'inattendu et de spontané, en s'affranchissant des codes stylistiques en vigueur, sera l'un des moteurs de la narration du spectacle, et de sa fabrique. La mobilité des orchestrations et des effectifs participe de l'affabulation, et de la circulation entre les imaginaires.
Un décor baroque en mouvement - La Maîtrise populaire ouvre en grand à ses jeunes artistes le plateau de l’Opéra comique. Pour les accompagner dans la construction de ces récits, Adeline Caron a conçu des éléments mobiles dont les agencements changent au fil des scènes : arbres portatifs, tables devenant des portes, chariots devenant des barques, ciel étoilé, océan de tissu argenté, grand monstre martin à combattre, marionnette géante animée par cinq enfants. Tous ces éléments empruntent à l’imaginaire baroque et à celui des contes, avec lesquels les jeunes artistes vont construire leur grande affabulation.
Costumes : les trésors de l’Opéra-Comique - Adeline Caron, qui conçoit aussi les costumes, est allée choisir dans les riches stocks de costumes de la maison. Cette Grande affabulation sera donc aussi une grande ré-appropriation de la mémoire d’un lieu. Aux pièces nouvelles (oiseaux, bêtes sauvages réalisés par Julia Brochier) se mêleront les costumes d’Alain Blanchot, de Macha Makaïeff, de Renato Bianchi et d’autres créateurs et créatrices encore plus anciens ayant travaillé pour l’Opéra Comique et l’équipe actuelle va retravailler et unifier.
« Comme on fait son rêve, on fait sa vie » - Cette phrase de Victor Hugo dans la Promontoire du songe sonne comme une phrase de résistance à l’heure où les vérités alternatives et la parcellisation de la société font vaciller notre espace commun. Ces jeunes artistes ont conscience de l’importance de l’imagination, non pas seulement pour s’évader de la réalité, mais aussi pour construire une vie en commun, et transformer leurs désirs en réalité. Entreprise fragile, vouée aux difficultés personnelles et collectives, mais dont l’espace de la scène est là pour rappeler la force et la nécessité.